Tout entrepreneur, après avoir eu l’idée qui est à l’origine de son projet, doit à un moment développer son projet pour pouvoir le lancer (et s’y lancer).
Le point de départ d’un projet innovant est bien évidemment l’idée innovante elle-même. Cependant, si le porteur de projet ne va pas au-delà de la simple idée de développer cette idée en véritable projet entrepreneurial, il ne pourra alors pas se définir en tant qu’entrepreneur, car il n’aura pas lancé de projet.
D’abord, il faut voir ce qu’un entrepreneur doit faire et quels sont les éléments auxquels il doit consacrer son temps pour pouvoir développer son idée en véritable projet. Puis, il faut déterminer son marché et les possibilités qui lui sont offertes, pour parvenir au meilleur lancement possible.
Cette étude est le résumé d’un MOOC de l’École Polytechnique de Paris. Cette étude est pertinente et apporte beaucoup d’éléments de réflexion. Ces éléments peuvent par ailleurs être séparés du fil conducteur, qui est le développement d’un projet innovant.
Étude
Développement de son projet innovant :
Après avoir eu son idée novatrice, l’entrepreneur innovateur doit avoir une certaine réflexion quant au développement de son projet. Cependant, ce porteur de projet doit être caractérisé davantage par son action que par sa réflexion.
Cela peut paraître un peu contradictoire, mais il est logique que l’entrepreneur innovateur se consacre davantage à faire développer et avancer son projet plutôt que de passer trop de temps à la réflexion et à la préparation de cette dernière. Cela vient du fait que tout projet entrepreneurial est caractérisé par la non-possibilité d’anticipation (totale) du futur. Alors, au lieu de passer du temps à vouloir anticiper les conséquences, il vaut mieux passer du temps dans l’avancement du projet par des actions concrètes.
Dans cette phase d’action, au début du projet, très généralement un projet entrepreneurial est caractérisé par la limitation des ressources, financières, humaines, etc. Quand le projet rencontre alors ses premiers clients, il n’est pas rare de voir son porteur de projet se spécialiser à ces clients pour répondre au mieux à leurs attentes.
Cependant, pour pouvoir se développer, un projet entrepreneurial doit atteindre d’autres clients et d’autres marchés. Mais, après avoir consacré du temps et de l’énergie pour répondre au mieux à ses premiers clients, et avoir focalisé sa stratégie autour de ce même client, il est difficile à l’entrepreneur innovateur de s’adapter à un nouveau client. Ceci est connu comme « l’écueil de la niche initiale », et il est parfois difficile de s’en sortir, ce qui peut être dangereux pour le développement du projet. Il ne faut donc pas diriger sa stratégie autour de ses premiers clients, pour garder une certaine flexibilité, nécessaire pour se développer autour d’un marché plus large.
Dans le développement du projet, l’entrepreneur innovateur passera par quatre phases bien distinctes :
- Tout d’abord, il y a la phase dite « commando ». Cette première phase est celle où l’entrepreneur innovateur, en tant que véritable porteur de projet, va être en avant, il va mener son équipe dans tous les aspects du projet. Il va avancer dans l’inconnu en tête de peloton comme un véritable leader.
- La deuxième phase qui est celle du développement des affaires, ainsi que la troisième phase qui est celle de la réflexion stratégique, se caractérisent quant à elles par une augmentation des niveaux hiérarchique, conséquence directe de la délégation des tâches. Effectivement, l’entrepreneur innovateur après avoir été le directeur commercial, s’occupe de moins en moins des missions sur le terrain, en contacte directe avec le client. Il s’occupe alors de plus en plus de la gestion globale du projet et de ses équipes.
- Pour finir, la dernière phase est celle où le porteur de projet devient « Corporate CEO ». À ce niveau-là, le porteur de projet n’est plus en contact avec la gestion « day-to-day », il s’intéresse davantage aux liens « entreprise-board (conseil d’administration) ». Il fait le lien donc entre les parties prenantes et son projet.
Ce qu’il est très important de comprendre ici, c’est que ces quatre phases d’un projet sont de nature très différente. Le porteur de projet va successivement passer par ces quatre. Or, il est primordial pour lui de savoir dans quelle phase il se trouve pour adapter son profil au type de gestion de projet adéquat.
Le problème, c’est que ce n’est souvent pas le cas et selon les études statistiques, une grande partie des fondateurs de start-ups sont amenés à quitter leur propre projet durant les premières années d’existence. Par ailleurs, ils quittent leur projet de manière non volontaire la plupart du temps. Ceci est une conséquence directe de la non-adaptation de leur manière de gérer leurs projets avec la phase dans laquelle ils se trouvent.
Les projets entrepreneuriaux sont très souvent en lien avec un board, composé de parties prenantes (actionnaires, conseillers, etc.). Selon le niveau de développement du projet, ce board aura un rôle différent à réaliser. Dans les phases précoces d’un projet, le rôle principal de ce dernier est tout simplement d’aider l’entrepreneur innovateur, de le soutenir dans ses décisions et de l’aider à garder sa position de leader. Le board est là donc pour soutenir la direction et ses actions. Ensuite, le board passe à un rôle de supervision, il se focalise davantage sur le lien entre la stratégie de la direction et l’intérêt des parties prenantes.
Un projet entrepreneurial est caractérisé par sa difficulté de développement. Pour pallier ces obstacles, très souvent, le porteur de projet va décider de s’associer avec une personne ou une entité morale, pour des raisons financières, de compétences, des raisons de réseau, etc.
On dit très souvent qu’être associé, c’est comme être marié. Lors de cette association, il faut impérativement que l’éthique et que les valeurs personnelles soient en accord pour l’avancement du projet. Des décisions stratégiques et de gestion seront à prendre, et si l’on n’a pas la même vision en tant qu’associé, ces décisions seront alors bloquées et l’avancement du projet sera compromis.
Dès le départ, il faut alors se mettre en accord sur des questions fondamentales comme : quand est-ce que je voudrais vendre mes parts sociales ? Sortir de l’entreprise ? Quels obstacles est-ce que je peux transgresser ? Qu’est-ce que je suis prêt à faire pour réussir ? Etc.
Si nous nous penchons sur ces différents aspects, nous augmentons alors nos chances de réussite de développement pérenne.
Après la création et le développement de notre projet entrepreneurial, il est temps de se lancer et de lancer ce projet dans le marché. Or avant ce lancement, il faut analyser ce marché pour optimiser nos chances de réussite dans le long terme.
Lancement de son projet innovant :
Il y a une différence importante à faire pour tout entrepreneur au début de son projet, pour ne pas tomber dans un piège d’ordre prévisionnel. Il faut faire la différence entre le marché potentiel et le marché adressable.
- Le marché potentiel est l’ensemble du marché que l’on voit dans un « full picture ». Il est grand et attrayant, cependant il ne correspond pas au marché auquel nous allons répondre directement, car il est trop vague, il comporte trop de clients qui ne seront pas atteint directement par notre offre.
- Le marché adressable est quant à lui pertinent pour définir le potentiel de marché que nous avons. Il peut cependant être difficile de calculer sa taille. Pour cela, nous partons du marché potentiel, mais nous prenons alors une part seulement de ce dernier, qui correspond aux clients qui vont être en lien direct avec nous. Une sorte de zoom in.
Cependant, dans bon nombre de cas (et cela est propre au projet d’innovation), l’évaluation de la taille de notre marché va être difficile à calculer car nous sommes des pionniers, les premiers entrants, et donc nous ne connaissons pas forcément le marché. Il n’y a pas forcément de données quant à cela, car nous n’avons pas de concurrents directs. Il faut alors chercher des entreprises comparables à la nôtre, même si c’est dans une zone géographique différente, et qui ne sera pas notre concurrent direct, pour pouvoir estimer une taille de marché réaliste.
L’ « information » est capitale pour un porteur de projet.
Par exemple, l’information sur comment est prise la décision finale d’une entreprise est très importante pour ce dernier. En effet, si l’on est une start-up et que l’on peut vendre une solution, proposer nos services à une entreprise qui prend des décisions au niveau de la direction générale, cela annonce une complication au niveau des transactions. Cela veut dire que la prise de décision sera caractérisée par une certaine rigidité. Or, une start-up n’a pas la patience et les compétences pour y faire face. L’accès aux décisionnaires sera également très difficile pour la start-up et elle n’aura alors pas la marge de manœuvre nécessaire.
Dans un marché, un projet innovateur aura toujours beaucoup de mal à convaincre des nouveaux utilisateurs d’adopter cette solution. En effet, les consommateurs vont toujours privilégier des solutions moins risquées, c’est-à-dire les solutions qu’ils connaissent. Or, si on lance des produits innovateurs avec peu de références, même si cela constitue une meilleure solution pour les clients, s’ils ne connaissent pas ce produit, ils auront du mal à l’adopter, car ils verront ce choix comme risqué.
Le niveau d’éducation du client est aussi à prendre en compte pour une entreprise. Plus les clients sont éduqués, plus ils vont voir l’utilité de l’innovation, voir les bénéfices et les avantages de cette innovation, et de ses caractéristiques. Or, des clients non-éduqués auront des choix plus subjectifs, et ne prendront pas forcément en compte les performances du produit.
La prise d’information et l’étude de l’environnement concurrentiel sont aussi primordiales pour tout entrepreneur. Il faut que le projet puisse être là où il n’y a pas un encombrement de concurrents, qu’il n’y ait pas un leader ou plusieurs leaders déjà en place dans ce secteur. Un nouvel entrant est un concurrent pour les acteurs en place et représente une menace. Il faut bien choisir ses guerres et ne pas vouloir affronter tous les acteurs dans différentes batailles pour perdre de l’énergie dès le départ du projet
Après l’analyse du marché, il faut amorcer le lancement du projet, sans pour autant attendre que toutes les ressources soient réunies, car la grande partie du pré-lancement du projet est réalisée (étude du marché).
En effet, la grande majorité des échecs de start-up est liée tout simplement au marché (et non au fait d’être prêt ou non à 100 %). La concurrence, les nouveaux entrants, les produits de substitution expliquent la grande part des échecs. Il y a aussi une partie non négligeable des échecs de projets dus simplement au fait que les clients n’achètent pas le produit ou la solution proposée.
Très souvent, face à la concurrence, au lieu de se focaliser dans une guerre des prix, où l’on va proposer les prix les plus bas, comme c’est le cas dans la plupart des concurrents, il faut se focaliser sur d’autres caractéristiques, comme le savoir-faire, la qualité, et trouver ainsi un marché spécifique à notre offre, qui sera différente de celle de nos concurrents.
Il faut savoir être flexible au niveau de sa stratégie pour surmonter les barrières à l’adoption. Certaines entreprises vont alors par exemple changer leur modèle d’affaires, et intégrer des acteurs externes comme partenaires pour pouvoir faire adopter leur offre plus facilement.
Dans cette phase du projet (mais même plus tard quand le projet sera plus mature), les feedbacks sont d’une importance capitale. Cependant, les feedbacks auprès de son cercle proche d’amis ou de sa famille ne sont pas conseillés, car ils auront une vue subjective sur le sujet et n’auront pas l’objectivité pour faire améliorer le projet. Il faut alors demander ce feedback à une catégorie de personnes qui était assez éloignée de nous au niveau personnel, pour qu’il puisse avoir une vue objective sur le sujet, mais qui est cependant accessible. C’est le cas du cercle d’amis de nos amis.
Opinion
Cette étude est très intéressante avec des éléments clé qui peuvent aider dans tout type de projet. En effet, ces quelques éléments peuvent servir comme une sorte de checklist lors du développement et du pré-lancement d’un projet.
Cette étude s’apparente davantage à des règles de base qu’il faut appliquer dans tout projet, pour maximiser ses chances de réussite.
Si l’on ne procède pas à cet exercice, comme une sorte de checklist, cela ne veut pas dire que nous n’allons pas réussir notre projet. Cependant, par la simplicité et la facilité de ses points, il serait préférable de les garder toujours dans un coin pour remettre en question la gestion de l’avancement de son projet.
Conclusion
Le développement et le lancement de son projet innovant sont tous les deux liés.
Après avoir eu son idée innovante, l’entrepreneur innovateur passera à la phase de développement de cette idée en tant que projet entrepreneurial. Il devra alors consacrer plus de temps et d’énergie quant à l’action plutôt qu’à la réflexion. Il manquera d’abord de ressources, mais cela n’est pas un prétexte pour ne pas garder sa flexibilité de développement autour d’une pluralité de cibles.
L’entrepreneur innovateur passera alors par quatre différentes phases de développement qui correspondront à quatre types de profils différents. Il devra adopter ses différents profils pour ne pas se trouver dans une situation où il sera évincé de sa propre entreprise, car il n’aura pas su s’adapter au développement de son projet.
Pour finir, l’entrepreneur innovateur doit connaître, et bien comprendre, sa relation avec les parties prenantes qui composent le board, mais aussi avec ses associés, si tel est le cas.
Après cette phase de développement, il y a donc le lancement de ce projet. Avant tout lancement de projet, il y a une étude approfondie du marché dans lequel nous voulons lancer notre projet. La majorité des échecs de projet sont liés directement à des questions de marché. Il est donc primordial de bien cerner le marché en question. La prise d’information quant à ses clients, ses concurrents, et à tout le contexte dans lequel notre projet se trouve(ra), est alors la clé de réussite.